- COLLOÏDES
- COLLOÏDESLes solutions colloïdales ou sols sont constituées par un liquide dans lequel un corps, généralement solide, est dispersé en granules dont la dimension moyenne est comprise entre deux dixièmes et deux millièmes de micromètres. Ces granules sont donc trop petits pour être visibles au microscope ordinaire, mais ils sont nettement plus gros que les molécules de taille courante. On peut donc les mettre en évidence et mesurer leurs dimensions par le microscope électronique. Autrement dit, les sols font la transition entre les solutions ordinaires et les suspensions plus ou moins grossières de particules solides dans un liquide.Cet état très dispersé de la matière confère aux solutions colloïdales un ensemble de propriétés communes qui justifient leur groupement. Les plus importantes sont les propriétés liées au mouvement brownien des particules (diffusion, équilibre de sédimentation, pression osmotique), les propriétés optiques , dues à la diffusion des radiations lumineuses par les granules, les propriétés électriques , causées par la charge des particules. Selon la nature des granules, il y a lieu de distinguer plusieurs types de sols dont les plus connus sont les solutions macromoléculaires, les sols minéraux et les sols micellaires.Dans certaines conditions de température et de concentration, certaines solutions colloïdales se prennent en une masse solide plus ou moins élastique appelée gel . Les systèmes les plus aptes à fournir des gels sont des systèmes macromoléculaires (eau et gélatine, eau et agar-agar). Ces mêmes systèmes permettent souvent d’obtenir des colles , d’où le nom de colloïdes proposé, en 1861, par Graham.Les macromolécules jouent un rôle capital en biologie et dans l’industrie des matières plastiques ou des textiles. Leur étude constitue une science particulière. Cependant, leurs sols ou leurs gels appartiennent incontestablement à la physico-chimie colloïdale. Parmi les sols minéraux, certains obtenus à partir d’isotopes radioactifs ont des applications médicales, en particulier dans le diagnostic. Quant aux sols micellaires, ils renferment la classe des détergents, dont on connaît l’importance pratique.1. Définitions généralesLa nomenclature de GrahamVers 1861, le physico-chimiste écossais Thomas Graham étudia la diffusion des corps dissous à travers des membranes poreuses d’origine végétale ou animale, perméables au solvant. Il examina surtout le cas des solutions aqueuses et pour cela employa principalement le parchemin et la baudruche qui sont perméables à l’eau.Les différences entre les vitesses de diffusion des corps dissous se révélèrent si importantes que Graham les utilisa pour classer les substances étudiées en deux catégories.Celles de la première catégorie sont des corps dissous qui traversent aisément les membranes précédentes. Elles comprennent tous les corps purs dont les entités cinétiques ultimes, molécules ou ions, ont un faible diamètre. C’est le cas du sucre, de l’urée, de la majorité des sels minéraux. Généralement, ces substances cristallisent par évaporation de leurs solutions. C’est la raison pour laquelle Graham les nomma cristalloïdes .Les corps de la seconde catégorie ne traversent pas ou traversent très difficilement la membrane. Leurs entités cinétiques ultimes ont un diamètre beaucoup plus grand que celui des entités cinétiques de la première catégorie. La gomme arabique, le caramel et la gélatine dispersés dans l’eau en sont trois exemples. Ces corps paraissent amorphes à l’état solide et, lorsqu’ils sont modérément imprégnés d’eau, fournissent souvent des gels ou des colles. Graham les appela colloïdes. Dispersés dans leur «solvant», ils forment des solutions colloïdales ou sols.Dans la nomenclature proposée par Graham, on précise par un préfixe la nature du solvant. On appelle hydrosols, alcoosols, éthérosols, les dispersions colloïdales dans l’eau, l’alcool et l’éther. Cette nomenclature a été conservée, bien que la classification de Graham soit maintenant dépassée.Les membranes utilisées doivent leurs propriétés au fait qu’elles sont percées de très nombreux canalicules ou pores, dont le diamètre moyen conditionne en grande partie la perméabilité. Plus le diamètre moyen des pores est grand, plus la membrane est perméable. On utilise un grand nombre de membranes naturelles ou artificielles que l’on peut ranger par ordre de perméabilité croissante. Un même corps en solution peut fort bien traverser une membrane et être retenu par une autre. Cependant, aucune raison sérieuse n’impose le choix de la première ou de la seconde pour établir la classification. La cristallisation n’est pas un test suffisant. Des corps que l’on range sans hésiter parmi les colloïdes peuvent cristalliser ou, tout au moins, se présenter sous une forme ordonnée, quasi cristalline. C’est le cas de l’hémoglobine et de l’ovalbumine. En outre, des sels parfaitement cristallisables se comportent comme des colloïdes lorsqu’ils sont dispersés dans un liquide convenable. Le chlorure de sodium fournit des solutions vraies avec l’eau et peut, avec le benzène, donner des benzosols.Ce dernier exemple prouve qu’un même corps peut se comporter tantôt comme un colloïde, tantôt comme un cristalloïde. Il est donc prudent d’abandonner la classification de Graham sous sa forme primitive. Au lieu de diviser les corps en colloïdes et cristalloïdes, il est préférable d’admettre l’existence d’un état colloïdal de la matière. La meilleure définition des sols consiste à les situer parmi les systèmes dispersés.Les sols parmi les systèmes dispersésUn système dispersé est formé par une phase ou masse homogène 﨏1 dans laquelle un corps 﨏2 se trouve disséminé à l’état de fines parcelles isolées les unes des autres. 﨏1 est la phase dispersante et 﨏2 le corps dispersé.Le brouillard ordinaire est un système dispersé naturel. La phase dispersante est l’air et le corps dispersé est de l’eau en très fines gouttelettes séparées les unes des autres.Les systèmes dispersés les plus intéressants sont ceux dont la phase dispersante 﨏1 est gazeuse ou liquide. Le tableau ci-dessous résume leur classification.Les solutions colloïdales s’obtiennent par la dispersion d’un corps 﨏2, généralement solide, dans une phase liquide 﨏1. Nous poserons, par définition, que les petits grains dispersés, ou granules , ont un diamètre moyen approximativement compris entre 2.10-7 cm (soit 2 nm) et 2.10-5 cm (soit 0,2 猪m). La limite inférieure correspond au diamètre de très grosses molécules et la limite supérieure au pouvoir séparateur des meilleurs microscopes optiques. En principe, les particules colloïdales ne sont donc pas visibles au microscope ordinaire.Tout en conservant une partie arbitraire relative à la fixation des limites du diamètre particulaire, la définition précédente des solutions colloïdales est plus logique et plus précise que celle de Graham.On peut donner une définition plus rigoureuse des dispersions colloïdales en les considérant comme des mélanges hétérogènes, c’est-à-dire où l’unité de structure n’est plus la molécule ou l’ion isolé mais un agrégat de molécules ou d’ions. Cette définition s’applique aux sols minéraux et aux colloïdes micellaires mais ne convient pas pour les solutions macromoléculaires qui sont des dispersions moléculaires.Mais il est bien entendu qu’il n’existe pas de discontinuité entre les sols grossiers et les suspensions d’une part, et entre les sols très fins et les solutions ordinaires d’autre part. Il en résulte que les propriétés communes aux sols et aux suspensions peuvent être étudiées en utilisant des suspensions, lorsque l’emploi de ces dernières est plus commode. C’est le cas pour le mouvement brownien, dont les lois furent vérifiées par Jean Perrin à l’aide de suspensions de gomme-gutte dont les granules sont parfaitement visibles au microscope.Les bactéries se distinguent au microscope. Cependant, on les traite parfois comme des solutions colloïdales. La classification des systèmes liquides dispersés reste donc arbitraire.2. Différents types de solLes particules colloïdales ont des structures très variées qui conduisent à classer les sols en plusieurs groupes.Solutions macromoléculairesCertaines particules s’identifient à des molécules géantes, naturelles ou artificielles, qui renferment des milliers d’atomes unis entre eux par de solides liaisons, généralement covalentes. On les nomme macromolécules. Leurs sols sont des solutions véritables, appelées solutions macromoléculaires. C’est le cas des solutions aqueuses de protéines. À cause de leur affinité pour le solvant, on les classait autrefois parmi les colloïdes lyophiles (hydrophiles si le solvant est l’eau). Cette classification est maintenant périmée. L’importance considérable des macromolécules en biologie et dans l’industrie des textiles et matières plastiques, leurs propriétés particulières dues au fait que leurs sols sont des dispersions moléculaires conduisent les physico-chimistes à les étudier à part. Cependant leurs solutions ou leurs gels appartiennent au domaine de la chimie colloïdale et sont pris parfois comme exemples.Beaucoup de corps macromoléculaires se dissolvent spontanément dans un solvant convenable. L’ovalbumine et la sérum-albumine se dissolvent dans l’eau à température ordinaire. La gélatine se disperse dans l’eau à partir de 37 0C. Comme toutes les protéines, les corps précédents s’ionisent en solution aqueuse en fournissant des macro-ions (cf. chap. 6).Sols minérauxD’autres particules résultent de l’extrême division de corps solides cristallins, tels que la silice, l’or, l’argent.Ces sols minéraux peuvent également être obtenus à partir de réactions chimiques dans lesquelles il y a formation de molécules insolubles qui s’associent pour donner le granule; des réactions d’hydrolyse, de double décomposition, de réduction ou d’oxydation, sont utilisées dans ce but. On prépare ainsi, par exemple, l’or colloïdal par réduction d’une solution de chlorure d’or.Les sols minéraux forment en réalité des sortes de microsuspensions et n’ont généralement que peu d’affinité pour le solvant: d’où le nom qu’on leur a parfois donné, de colloïdes lyophobes (hydrophobes si le milieu disperseur est l’eau).Il n’existe cependant pas de classes bien tranchées et il ne faudrait pas croire que le granule soit une reproduction fidèle, à l’échelle infinitésimale, du cristal correspondant de taille normale. Si le cœur du microcristallite peut conserver la structure du cristal, sa surface est toujours modifiée. Par exemple, les granules de silice provenant de la pulvérisation de la quartzite «mûrissent» lentement dans leur eau de suspension de telle sorte que les couches superficielles se décristallisent en s’hydratant. Sans qu’elle soit toujours aussi nette que dans l’exemple cité, la réorganisation superficielle des cristallites dans leur liquide de suspension est un fait général et important, car les phénomènes de surface jouent un rôle prépondérant dans tous les systèmes dispersés.En particulier, l’adsorption d’ions ou de molécules de taille normale à la surface des granules peut modifier profondément les propriétés de ceux-ci. D’après Jacques Duclaux, les sols d’hydroxyde ferrique obtenus par hydrolyse à chaud du chlorure ferrique doivent leur stabilité à l’adsorption de molécules en excès de chlorure ferrique sur les particules d’hydroxyde.Sols micellaires des agents de surface. Colloïdes d’associationLes agents de surface (savons, détergents synthétiques, etc.) sont des corps dont la molécule est amphiphile. Une partie de la molécule (groupe polaire ou ionique) présente une forte affinité pour l’eau, l’autre partie de la molécule (chaîne hydrocarbonée, par exemple) est hydrophobe, d’où la tendance de ces corps à s’adsorber en couche orientée à la surface de leurs solutions aqueuses ou à l’interface entre une solution aqueuse et un liquide organique. Certains agents de surface sont des électrolytes en solution aqueuse: l’architecture hydrocarbonée porte un anion ou un cation. D’autres agents de surface ne sont pas dissociables en ions.La plupart des agents de surface, en solution aqueuse, forment, à partir d’une concentration donnée qu’on appelle concentration critique micellaire (C.C.M.), et lorsque la température est supérieure à une température critique (point de Krafft), des agglomérats de quelques dizaines ou quelques centaines d’unités moléculaires ou ioniques: ce sont les micelles.Dans ces agglomérats, les unités constituantes tournent leurs extrémités hydrophiles vers l’extérieur (c’est-à-dire vers la solution aqueuse), leurs chaînes hydrocarbonées vers l’intérieur; l’intérieur de la micelle est comparable à une gouttelette d’huile minérale. Les micelles baignent dans une solution vraie du corps amphiphile qui les constitue et sont en équilibre avec cette solution intermicellaire (fig. 1).Les micelles sont en général des sphérules, comme l’ont montré diverses mesures optiques (diffusion de la lumière ou des rayons X). Les mêmes mesures – ou l’ultracentrifugation – permettent de déterminer le rayon des micelles (de 2 à 3 nm pour les agents de surface les plus courants en solution dans l’eau pure).Une discontinuité brusque de certaines propriétés de la solution apparaît à la C.C.M. et conduit à la détermination de sa valeur (généralement de l’ordre de 10-3 molaire à 10-2 molaire).En solution aqueuse de concentration élevée (100 ou 200 fois supérieure à la C.C.M.), les agents de surface forment des associations ayant l’apparence de filaments ou de lamelles. À cette forme d’agglomérats correspond la gélification de la solution.Les micelles jouent un rôle important dans le mécanisme de l’action mouillante, pénétrante, détergente des agents de surface. Elles participent au pouvoir détergent en dissolvant les graisses.Certains médicaments forment dans l’eau des associations micellaires; leur C.C.M. a pu être déterminée.3. Influence du mouvement brownien sur les propriétés des solsMouvement brownienComme le rappelle son nom, le mouvement brownien fut découvert, en 1827, par le botaniste anglais Brown, qui examinait au microscope des grains de pollen dispersés dans une goutte liquide. Entre 1887 et 1895, le physicien français Gouy en fit une remarquable étude expérimentale.Pour l’observer, il suffit d’examiner, à l’aide d’un bon microscope, une suspension de particules dont le diamètre n’excède pas un ou deux micromètres. On constate que les particules effectuent, indépendamment les unes des autres, des mouvements incessants et complètement désordonnés. Gouy montra que ce phénomène ne peut être attribué à des causes extérieures telles que des trépidations mécaniques. Indépendant de la nature du corps dispersé, il est d’autant plus intense que la température est plus élevée et les particules plus petites. Par exemple, l’observation ultra-microscopique montre que les mouvements des granules sont beaucoup plus rapides dans un sol que dans une suspension de gomme-gutte.En plus du mouvement de translation, il existe un mouvement brownien de rotation que l’on observe dans les suspensions lorsque certains granules présentent des détails superficiels repérables au microscope.Le mouvement brownien est un phénomène très général qui s’observe dans tous les systèmes à particules très fines dont la phase dispersante est liquide ou gazeuse. Il était naturel, à la fin du XIXe siècle, c’est-à-dire à une époque où la théorie cinétique des fluides s’était déjà imposée, que Delsaux et Carbonnelle, puis Gouy attribuassent le mouvement brownien à l’agitation thermique des molécules.Lorsqu’une particule assez grosse se trouve en suspension dans un fluide, par exemple dans un liquide, elle reçoit de la part des molécules de ce liquide des millions de chocs par seconde. Or, d’après l’hypothèse de l’équipartition statistique des vitesses moléculaires, elle subit sensiblement le même nombre de chocs de chaque côté, de sorte qu’elle ne bouge pas. Mais si la particule est suffisamment petite, les fluctuations dans la répartition et l’intensité des chocs ne sont plus négligeables. La particule est soumise à une série d’impulsions et, comme elle possède très peu d’inertie, elle effectue des déplacements désordonnés qui sont l’image au ralenti des mouvements moléculaires. Il est même logique de supposer que les particules dispersées se mettent en équilibre thermique avec les molécules du fluide.L’exactitude de ces hypothèses ne fait plus de doute à l’heure actuelle. Mais il fallut attendre 1905 pour qu’Einstein en tire des lois quantitatives vérifiables par l’expérience. Son analyse du phénomène est en partie cinétique, en partie thermodynamique. À ce titre, elle est moins satisfaisante pour l’esprit que l’analyse subtile et purement cinétique de son contemporain Smoluchowsky, mais elle a l’énorme avantage de conduire à des résultats précis. Les deux savants comprirent que la grandeur vraiment caractéristique de l’activité du mouvement brownien est, non pas la vitesse moyenne, mais le déplacement quadratique moyen.Supposons que l’une des n particules présentes passe, pendant le temps t , d’un point initial A au point final B, en suivant un trajet plus ou moins enchevêtré dont nous n’avons pas à tenir compte. Appelons l la longueur AB, x sa projection sur un axe horizontal quelconque Ox (fig. 2).Le déplacement quadratique moyen suivant Ox est, par définition:la somme étant étendue aux n molécules qui se déplacent pendant le même temps t. X2 est indépendant de n si le nombre de particules est suffisamment élevé. Il est proportionnel au temps :x 2 est le déplacement quadratique moyen suivant Ox pendant l’unité de temps. Pour des granules sphériques indéformables, suffisamment éloignés les uns des autres et dont le rayon est grand par rapport à celui des molécules de la phase dispersante, Einstein établit la relation:où R = constante universelle des gaz parfaits, T = température absolue, N = nombre d’Avogadro, 兀 = coefficient de viscosité du liquide intergranulaire, a = rayon de la particule.Le carré moyen de la rotation de la particule pendant l’unité de temps est donné par la relation analogue:On a obtenu de bonnes vérifications expérimentales de ces relations en étudiant le déplacement des particules suffisamment grosses pour qu’on puisse les observer au microscope en suspension dans l’eau.Pour des molécules en solution qu’on ne peut pas observer directement, l’agitation brownienne conduit à une inhomogénéité. En effet les molécules qui se déplacent au hasard ont statistiquement une distribution uniforme dans un volume assez étendu pour en renfermer un très grand nombre, mais il n’y a pas le même nombre de molécules au même moment dans deux éléments très petits de volume. Il en résulte donc des fluctuations de densité dans chaque élément de volume. Ces fluctuations sont à l’origine de la lumière diffusée (cf. chap. 5) car si les molécules étaient parfaitement immobiles, il n’y aurait pas de lumière diffusée.Depuis l’apparition des lasers, sources de lumière monochromatique, dont le temps de cohérence est supérieur à la durée de vie d’une fluctuation, il est possible d’étudier la relaxation temporelle des fluctuations et ainsi le mouvement brownien.Le mouvement brownien de translation des particules colloïdales entraîne un certain nombre de conséquences, parmi lesquelles on retiendra la diffusion des granules, la pression osmotique des sols, les équilibres de sédimentation.Diffusion des particules colloïdalesParce qu’elles se mettent en équilibre d’agitation thermique avec le liquide intergranulaire, les particules colloïdales diffusent dans ce liquide, à la façon de molécules dissoutes ordinaires, mais beaucoup plus lentement. C’est d’ailleurs en étudiant le mouvement brownien qu’Einstein relia le coefficient de diffusion d’une entité cinétique à son déplacement quadratique moyen. Il obtint l’expression très simple:où D désigne le coefficient de diffusion.Donc, il s’agit de granules sphériques:En admettant que la formule précédente s’applique grossièrement aux molécules sphériques dissoutes de taille normale, on voit que, dans des conditions identiques de milieu et de température, des particules colloïdales de rayon a = 0,2 猪m = 2.10-5 cm, diffusent mille fois moins vite que des molécules de rayon a = 2.10-8 cm.Pression osmotique des solsAu mouvement d’agitation thermique des particules colloïdales on peut associer une pression osmotique 諸 donnée approximativement, comme dans le cas des molécules ordinaires dissoutes, par la loi de Van’t Hoff:où V désigne le volume du sol renfermant n moles du corps dispersé, soit n N particules. R, T et N ont leurs significations habituelles, précisées ci-dessus.Cette pression osmotique ne se manifeste que si, à l’aide d’une membrane semi-perméable, on bloque la diffusion des granules colloïdaux, sans empêcher la diffusion des molécules du liquide intergranulaire. Les membranes de Cellophane jouent fort bien ce rôle dans le cas des hydrosols et permettent de construire les osmomètres correspondants.La formule de Van’t Hoff peut s’écrire:c représentant la concentration moléculaire, généralement donnée en moles par litre. Or c = 猪/M, avec 猪 = masse du corps dispersé dans l’unité de volume du sol et M = masse moléculaire du corps dispersé. Donc:C’est le principe de la détermination des masses moléculaires des particules par mesure de la pression osmotique. Connaissant M on en déduit la masse moyenne d’une particule, m = M/N. Il s’agit bien d’une masse moyenne, car, contrairement à ce qui se passe dans les solutions ordinaires, les sols sont presque toujours plus ou moins polydispersés du point de vue de la taille des granules.Les pressions osmotiques des sols sont relativement faibles à cause de la petitesse des concentrations moléculaires. Elles sont cependant de l’ordre du centimètre d’eau, donc parfaitement mesurables.L’osmométrie a souvent été appliquée à la mesure des masses moléculaires des protéines. Elle est alors rendue délicate par le fait que les protéines sont des polyélectrolytes et que la présence d’impuretés ioniques peut donner lieu à des équilibres de Donnan à travers la membrane.Équilibres de sédimentationConsidérons une suspension ou un sol en équilibre thermostatique dans une éprouvette verticale d’axe Oz et de section unité. On constate expérimentalement que le nombre n de granules par unité de volume diminue quand la cote z augmente (fig. 3). Le problème de la répartition verticale des particules est analogue à celui de la raréfaction de l’air avec l’altitude.Soit n la concentration des granules à la cote z et v le volume de l’un des granules que l’on suppose tous identiques. Une couche de sol très mince de cote z et d’épaisseur dz renferme ndz granules qui correspondent à une variation de volume dv (dv = ndz ). Ces granules sont soumis à deux actions opposées.a ) Leur poids efficace (poids réel diminué de la poussée d’Archimède du liquide) tend à les rassembler dans le fond de l’éprouvette, c’est-à-dire à provoquer leur sédimentation complète. On suppose évidemment que la masse volumique D des granules est supérieure à la masse volumique d du liquide intergranulaire.b ) L’agitation brownienne tend à faire diffuser les particules vers les points de plus faible concentration, c’est-à-dire vers le haut de l’éprouvette. À ce sujet, tout se passe comme si, dans la tranche dz , les particules étaient soumises à une force thermodynamique de diffusion égale à la différence des pressions osmotiques aux niveaux z et z + dz. Le calcul de cette force est immédiat par application de la loi de Van’t Hoff.En écrivant que les deux forces sont égales et opposées quand l’équilibre thermostatique est réalisé, on obtient la relation:n 0 désigne la concentration des granules à la cote zéro, c’est-à-dire au fond de l’éprouvette; g est l’accélération de la pesanteur; R, T et N ont leurs significations habituelles. Toutes choses égales par ailleurs, on voit que n est une exponentielle décroissante de v. La raréfaction des granules quand la cote augmente est extrêmement rapide pour les suspensions, très lente pour des sols fins.Jean Perrin vérifia quantitativement cette relation par des expériences mémorables décrites dans son livre Les Atomes. On ne saurait trop insister sur l’importance de ces derniers résultats, qui justifient l’hypothèse selon laquelle, par leur mouvement brownien, les particules se mettent en équilibre thermique avec les molécules de la phase dispersante. Ce fut l’opinion du Comité Nobel qui attribua son prix de physique 1926 à Jean Perrin «pour ses travaux sur la structure discontinue de la matière, en particulier pour sa découverte de l’équilibre de sédimentation».4. Dialyse. ÉlectrodialyseLa séparation des colloïdes des substances de bas poids moléculaire peut en principe, comme on vient de le voir, être effectuée en se fondant sur les différences de leurs coefficients de diffusion: les colloïdes dont la masse particulaire est élevée ont un coefficient de diffusion nettement plus faible que les petites molécules ou les ions. Donc, si l’on superpose une solution et son solvant, ce dernier s’enrichira en la substance la plus diffusible.Cette séparation est encore plus facile à réaliser en interposant une membrane entre les deux phases. Telle est d’ailleurs l’expérience fondamentale de Graham. La dialyse est ainsi définie comme une méthode de séparation par diffusion à travers une membrane.Les membranes utilisées dans la dialyse sont poreuses comme la Cellophane (diamètre des pores: 0,0025 猪m) et la membrane peut être perméable à certaines substances, imperméable à d’autres selon leurs dimensions: la diffusion de grosses molécules déjà faible en elle-même est diminuée ou arrêtée, tandis que les petites particules peuvent diffuser presque librement.D’autres phénomènes peuvent intervenir secondairement: charge de la membrane, solubilité préférentielle.La dialyse est surtout utilisée pour éliminer d’une solution colloïdale les molécules ou ions qu’elle contient. On purifie ainsi certaines substances d’origine biologique, car ce procédé de séparation a l’avantage de ne pas entraîner une modification des substances soumises à l’expérience.Ne nécessitant qu’un appareillage simple et peu coûteux, la dialyse a cependant l’inconvénient d’être une opération de longue durée. On a avantage, pour augmenter la vitesse de dialyse, à renouveler constamment le solvant.On peut améliorer le transport des ions à travers la membrane en appliquant un champ électrique; le procédé est alors appelé électrodialyse.L’électrodialyseur comprend trois compartiments; le compartiment médian, dans lequel on place la solution colloïdale, est séparé par une membrane des deux autres, dans lesquels sont placées les électrodes et où circule de l’eau distillée (fig. 4).5. Propriétés optiquesDiffusion de la lumièreLa trace d’un faisceau intense de lumière blanche envoyé dans une solution colloïdale devient visible au cours de la traversée de la cuve. Ce phénomène, dit effet Tyndall, est dû à la diffusion , par les particules colloïdales, d’une partie de la lumière.En réalité, toutes les substances sont capables de diffuser de la lumière dans une certaine proportion, mais l’intensité ainsi diffusée dépend de la taille de la particule; aussi, pour les solutions ordinaires, l’intensité est trop faible pour être observée directement à l’œil nu: seuls des systèmes perfectionnés permettent alors de mettre ce phénomène en évidence.Le champ électrique de la radiation électromagnétique incidente induit des dipôles dans les molécules et les particules. Ces dipôles seront générateurs d’une radiation électromagnétique.Si les particules sont petites par rapport à la longueur d’onde de la radiation incidente, la radiation diffusée a même longueur d’onde que la radiation incidente: c’est le phénomène de diffusion de la lumière sans changement de longueur d’onde. La radiation secondaire est diffusée dans toutes les directions de l’espace.En réalité, les phénomènes sont plus ou moins complexes, suivant le rapport entre les dimensions des particules et la longueur d’onde de la radiation primaire, suivant les indices de réfraction relatifs de la phase dispersée et de la phase dispersante, et suivant la forme des particules.Dans le cas le plus simple où les particules colloïdales ont des dimensions qui ne dépassent pas 1/20 de la longueur d’onde de la radiation incidente et dont l’indice de réfraction diffère très peu de celui de la phase dispersée, la théorie aboutit à une relation analogue à la loi de Rayleigh établie pour les gaz, c’est-à-dire que l’intensité I de la lumière diffusée dans la direction dépend de la masse moléculaire M, de la concentration c :Cette relation s’applique bien aux solutions macromoléculaires très diluées dont les particules sont sphériques et ont un diamètre compris entre 5 et 25 nm.Pour les solutions vraies, l’extrapolation à 0 de la courbe Kc /R, les intensités diffusées étant mesurées à 900 du faisceau incident, en fonction de c , conduit à déterminer la masse moléculaire M.Lorsque les dimensions des particules deviennent supérieures à 25 nm, chaque particule devient un ensemble de dipôles nevibrant pas en phase. L’intensité de la lumière diffusée est alors une fonction complexe de l’angle d’observation et de la forme de la particule. L’analyse de cette fonction permet d’obtenir, dans le cas des macromolécules dont l’indice de réfraction est voisin de celui du solvant, le rayon de giration qui mesure en somme l’encombrement de la molécule en solution. On peut alors, connaissant la masse moléculaire, en déduire la forme la plus probable.Lorsque enfin l’indice de réfraction des particules diffère notablement de celui du solvant, et c’est le cas pour les colloïdes minéraux, la théorie devient très complexe. Aussi cette méthode, surtout employée pour déterminer les masses moléculaires des macromolécules, est-elle peu utilisée dans le cas des colloïdes minéraux. Elle a en outre l’inconvénient de ne pas permettre une vision directe des particules; et la forme de celles-ci a des répercussions importantes sur le diagramme de diffusion dans le cas où elles ne sont pas très petites.UltramicroscopeLes dimensions des particules colloïdales sont telles (face=F0019 麗 0,2 猪m) qu’on ne peut les observer au microscope. On peut cependant déceler la présence de ces particules en se fondant sur le phénomène de diffusion.Dans l’effet Tyndall, on observe à l’œil un phénomène global. En modifiant légèrement le microscope, on peut arriver à observer la lumière diffusée individuellement par chaque particule. Il faut pour cela utiliser une source éclairante suffisamment intense, et empêcher la faible quantité de lumière diffusée d’être noyée dans la lumière directe.En principe, donc, on envoie horizontalement un faisceau très intense dans une cellule renfermant un colloïde. Avec un microscope, on observe dans une direction perpendiculaire (fig. 5).Dans le champ, on voit des points brillants sur fond noir. Il y a lieu de noter qu’il ne s’agit pas là des images vraies des particules, mais des images de diffraction dues à la lumière diffusée par chacune.Ainsi, dans l’ultramicroscope, on ne distingue pas la forme des particules, mais il est possible de détecter leur présence, de les compter et d’étudier leur mouvement brownien. Le phénomène est net avec les colloïdes dont les particules ont un indice de réfraction différent de celui du milieu dispersant; il est très faible avec les colloïdes macromoléculaires, en raison de leurs faibles indices.On peut, d’une manière indirecte, déterminer à l’ultramicroscope la taille des particules. Le sol étant suffisamment dilué, on compte les particules d’un volume connu. Connaissant la quantité totale de substance par unité de volume et sa densité, on calcule le volume moyen d’une simple particule; en supposant les particules sphériques et de dimensions identiques, on peut calculer leur diamètre.6. Propriétés électriquesLorsque des particules en suspension dans certains liquides (et tout spécialement dans l’eau) sont soumises à un champ électrique, elles tendent en général à se déplacer dans ce champ: c’est l’électrophorèse. La mobilité électrophorétique est la vitesse d’une particule dans un champ unité.L’interprétation classique de l’électrophorèse se fonde sur la structure des couches doubles électriques aux interfaces. La surface d’une particule acquiert en général une charge électrique au contact de l’eau ou de certains liquides. Ainsi des grains de silice ou de verre tendent, en présence d’eau ou d’une solution aqueuse diluée, à se charger négativement, en perdant des ions H+ s’il s’agit de silice, des ions Na+ s’il s’agit de verre; la charge des micelles des agents de surfaces ioniques, comme celles du lauryl-sulfate de sodium, est due à la dissociation partielle de chacun de ces agglomérats en un «gros ion » (association de p ions à longue chaîne et de n «petits ions» liés) et en (p – n ) «petits ions» libres. Dans les cas où la particule n’est pas capable de perdre des ions, on attribue en général la charge électrique de la particule à l’adsorption préférentielle d’un type d’ions de la solution, ou d’ions d’un signe donné. Mais un petit volume de suspension, contenant un certain nombre de particules et le liquide qui les porte, doit être électriquement neutre: pour y maintenir un excès notable de charges électriques d’un signe donné, il faudrait fournir au système une énergie considérable (principe d’électroneutralité); des ions de signe opposé à celui de la charge superficielle de la particule («gegenions») compensent exactement cette charge et forment autour de chaque particule une atmosphère ionique diffuse. Dans un champ électrique extérieur, la particule est entraînée dans un sens; on admet en général que son mouvement est freiné par celui des «gegenions» entraînés dans le sens opposé.La mesure de la mobilité électrophorétique peut s’effectuer par observation directe des particules sous microscope si ces particules sont visibles à l’aide de cet appareil; dans le cas contraire, on observe par des moyens optiques appropriés le déplacement dans le champ électrique d’une frontière initialement créée entre la solution colloïdale et le solvant pur. Les techniques permettant cette mesure sont examinées dans l’article ÉLECTROPHORÈSE. On se bornera ici à donner un aperçu de l’aspect des faits expérimentaux.Dans beaucoup de cas, les particules colloïdales apparaissent comme chargées négativement , c’est-à-dire qu’elles se déplacent vers l’électrode positive (cas des suspensions de silice ou de verre dans l’eau pure, de l’argent ou de l’or colloïdal, des micelles d’agents de surface anioniques, etc.); plus rarement (suspensions dans l’eau pure de certains hydroxydes métalliques, micelles d’agents de surface cationiques, etc.), elles apparaissent comme chargées positivement. En milieu aqueux, l’ordre de grandeur des mobilités électrophorétiques – positives ou négatives – est en général de quelques micromètres par seconde dans un champ de un volt par centimètre, valeurs très proches de celles de la mobilité des «petits ions» comme Na+ ou Cl-.Si l’on compare la mobilité de plusieurs particules de même matière, mais de tailles différentes, placées dans les mêmes conditions, on constate que cette mobilité est pratiquement indépendante de la taille de la particule.La mobilité diminue en général en valeur absolue lorsque la concentration saline du liquide de suspension augmente (il peut arriver qu’elle s’annule et change de signe aux très grandes concentrations salines). La présence – même à faible concentration – de certains ions capables de s’adsorber énergiquement à la surface d’une particule de signe opposé (par exemple cations à longue chaîne sur la silice) peut également provoquer l’inversion du signe de la mobilité.Pour certains systèmes colloïdaux, la mobilité varie avec le pH du liquide; le signe de la mobilité s’inverse pour une valeur du pH dit point isoélectrique. C’est le cas en particulier des solutions de protéines, macromolécules porteuses de groupes amines et de groupes acides (corps dits amphotères ).Les colloïdes tendent généralement à floculer lorsqu’ils sont placés dans des conditions telles que la mobilité – c’est-à-dire aussi la charge électrique des particules – devienne très petite.Si une suspension colloïdale est en cours de sédimentation – naturelle ou accélérée par la centrifugation –, on constate une différence de potentiel électrique entre deux points du système situés à des niveaux différents. C’est l’effet Dorn ; on peut le considérer comme le phénomène réciproque de l’électrophorèse.7. Stabilité des sols et des suspensionsLes macromolécules donnent des solutions avec des solvants appropriés. On a donc affaire dans ce cas au problème général de la solubilité dans lequel interviennent les valeurs relatives des forces d’interaction solvant-soluté, soluté-soluté, solvant-solvant. De nombreuses macromolécules sont ainsi solubles dans l’eau car elles présentent des groupements hydrophiles (–OH, –COOH...). Les solutions macromoléculaires sont naturellement stables; mais en plus de cette hydrophilie, peuvent intervenir des phénomènes d’ionisation dans cette stabilité.À l’opposé les sols minéraux sont formés de particules insolubles ne présentant aucune affinité pour le solvant; elles peuvent alors sédimenter sous l’effet de la gravitation. En réalité pour des particules de faible poids apparent (de dimensions inférieures à 1 猪m) la sédimentation ne se produit pas car le mouvement brownien compense largement l’action de la pesanteur. À condition toutefois que ces particules ne s’agglomèrent pas.Or aux distances interparticulaires les forces de Van der Waals se manifestent et les particules s’attirent; il peut alors y avoir agglomération. Les amas de particules solides deviennent de plus en plus gros et le sol flocule; dans le cas des gouttelettes liquides, elles fusionnent: c’est la coalescence.Les forces de Van der Waals apparaissent ainsi comme un facteur déstabilisant.Mais, comme nous l’avons vu, les particules des sols minéraux portent souvent une charge électrique. À l’interface granule-liquide interparticulaire apparaît une couche double considérée en général comme diffuse. Deux particules chargées tendent ainsi à se repousser.La stabilité du colloïde minéral apparaît ainsi comme la résultante des forces d’attraction de Van der Waals et de la répulsion de la couche double. Il existe une valeur critique du potentiel au-dessus de laquelle le système est stable et au-dessous de laquelle la floculation apparaît.Ce potentiel dit «zêta» dépend de la force ionique du milieu. Quand on ajoute un électrolyte au liquide intergranulaire, la force ionique augmente et le potentiel diminue. La zone de protection électrostatique des granules étant plus étroite, les rencontres des ions seront facilitées et la stabilité sera diminuée. Lorsque l’addition d’électrolyte devient notable, la charge elle-même du granule peut diminuer et cette deuxième action intervient dans la déstabilisation.Pour accroître au contraire la stabilité d’un sol minéral, on peut d’abord augmenter le potentiel de surface et la densité de charge. La «peptisation» permet ainsi de faire passer un précipité insoluble à l’état colloïdal en provoquant par exemple des réactions superficielles.On peut aussi apporter des groupements hydrophiles, et les agents stabilisants de ce type sont en général macromoléculaires: polysaccharides, dextrine, méthylcellulose; l’énergie d’interaction entre les particules tend alors à devenir voisine de l’énergie d’interaction entre les particules hydratées en surface et le liquide environnant.Il peut y avoir un effet combiné de la charge et de l’hydrophilie; c’est le cas des polyélectrolytes comme la gélatine dont l’effet stabilisant est bien connu.La fixation d’un stabilisant, par exemple une macromolécule, sur une particule minérale fait intervenir bien des facteurs. Il peut y avoir au départ une réaction comme par exemple la formation d’un complexe (interaction or-gélatine) mais la forme de la molécule stabilisante, son encombrement, la façon dont elle se fixe sur le colloïde et les dimensions respectives du protecteur et du protégé ont été envisagés.8. Détermination des dimensions particulairesDe nombreuses méthodes peuvent être utilisées pour déterminer la taille des particules colloïdales; elles ne sont cependant pas toutes applicables à tous les colloïdes.Il existe d’abord des méthodes qui dérivent plus ou moins de celles qui sont utilisées dans le cas des suspensions: les particules peuvent être dénombrées et mesurées directement au microscope ; leur grandeur peut être déterminée et leur répartition étudiée par tamisage ou filtration; on peut encore mettre à profit la sédimentation. Ces trois procédés se retrouvent transposés dans le cas des solutions colloïdales par l’emploi du microscope électronique, des ultrafiltres et des ultracentrifugeuses.Certaines méthodes découlent des propriétés optiques des colloïdes (ultramicroscope, diffusion de la lumière), ou d’autres propriétés, comme la viscosité.Les dimensions des particules colloïdales sont trop faibles pour qu’on puisse les observer avec un microscope conventionnel. Par contre, le pouvoir de résolution des microscopes électroniques se situe entre 0,1 et 0,2 nm. Le domaine colloïdal est, par conséquent, situé à l’intérieur des limites d’observation du microscope électronique. On peut donc voir et observer directement les particules colloïdales et il est possible de déterminer directement la taille et la forme de ces particules. Les colloïdes minéraux (métaux et oxydes colloïdaux, carbone, argile, etc.) sont fréquemment étudiés ainsi. Cependant, les échantillons doivent subir une préparation au cours de laquelle les particules subissent l’action d’un vide poussé. On ne peut donc assurer, dans certains cas, en particulier pour les macromolécules, que l’image observée reflète la forme et la taille des particules telles qu’elles sont, à l’état de dispersion dans le liquide.L’évaluation de la taille des particules est, en principe, possible par ultrafiltration , à travers des ultrafiltres dont les pores ont des diamètres différents et qui ont été étalonnés au préalable avec des colloïdes de taille connue. De nombreux phénomènes secondaires (charge, colmatage, etc.) rendent cependant la méthode difficilement applicable au cas des colloïdes minéraux.Lorsque les particules en suspension sont très fines, l’agitation brownienne contrebalance l’action de la pesanteur et la répartition devient pratiquement uniforme. Pour faire sédimenter les particules, il faut alors substituer au champ de pesanteur le champ de gravitation établi dans une centrifugeuse tournant à très grande vitesse, qui peut être considérablement plus élevé (plusieurs centaines de milliers de fois celui de la pesanteur).De même que la vitesse de chute des grains de suspensions permet de déduire leur dimension, on peut, en suivant le déplacement des particules colloïdales dans le champ de l’ultracentrifugeuse, remonter à leurs dimensions. L’ultracentrifugation est cependant utilisée surtout dans le cas des macromolécules.Dans le cas des solutions macromoléculaires, la mesure de la pression osmotique permet d’atteindre les masses moléculaires. Cette détermination est fondée sur la loi de Van’t Hoff:dans laquelle 諸 = pression osmotique, M = masse moléculaire, c = concentration, R = constante des gaz et T = température absolue.Cette loi s’applique aux solutions très diluées de macromolécules ayant une forme sensiblement sphérique. Pour les autres, en particulier pour les colloïdes linéaires, comme la cellulose, le rapport 諸/c ne reste pas constant pour une température donnée: il varie avec la concentration. Aussi, pour atteindre la masse moléculaire, faut-il déterminer graphiquement la valeur limite vers laquelle tend ce rapport pour une dilution infinie.Les solutions colloïdales préparées à partir des macromolécules ont une viscosité beaucoup plus élevée que celle du solvant.Les mesures de viscosité étant en général faciles et rapides, on se sert, dans l’industrie, de la viscosité, pour caractériser les macromolécules. On utilise habituellement dans ce but la viscosité intrinsèque ( 兀); pour cela, on mesure la viscosité 兀 de la solution macromoléculaire pour différentes concentrations et on calcule, pour chaque concentration c , la viscosité spécifique ( 兀 – 兀0)/ 兀0, expression dans laquelle 兀0 représente la viscosité du solvant. Pour connaître la valeur de la viscosité intrinsèque, on détermine ensuite graphiquement la limite vers laquelle tend le rapport ( 兀 – 兀0)/ 兀0 lorsque la concentration c tend vers zéro.Pour un même composé macromoléculaire, la viscosité augmente avec la masse moléculaire. Les relations théoriques entre la viscosité et la masse moléculaire sont cependant difficiles à établir, d’autres facteurs intervenant, et, en particulier, la forme des macromolécules. La formule la plus généralement admise est:dans laquelle M représente la masse moléculaire et où K et 見 dépendent du système considéré. Ces constantes K et 見 peuvent être déterminées à partir de fractions du même composé dont les masses moléculaires ont été mesurées par une autre méthode.L’interprétation des mesures de viscosité devient encore plus délicate avec les polyélectrolytes. Quant aux sols de colloïdes minéraux, ils sont, en général, peu visqueux.Un appareil, le compteur Coulter , sert à dénombrer les particules d’une suspension ou d’une émulsion, à condition que le rayon des particules soit au moins égal à 0,2 猪m (on se trouve donc à la limite supérieure du domaine colloïdal) et que le liquide de suspension soit légèrement conducteur. Un volume connu de suspension circule dans un canal cylindrique très fin et très court (diamètre et longueur de l’ordre de quelques micromètres), pratiqué dans une matière dure et isolante (rubis). Chaque fois qu’une particule se trouve engagée dans le canal, la résistance électrique de la colonne liquide limitée par le canal augmente et chaque augmentation de résistance provoque le déclenchement du compteur. Un «écrètement» approprié permet en outre d’enregistrer seulement le passage de particules de diamètre supérieur à une valeur donnée; on peut ainsi préciser la répartition granulométrique des particules étudiées.Dans les solutions colloïdales, les particules ont, la plupart du temps, des dimensions différentes: il existe toute une distribution des tailles, et on dit que le sol est polydispersé. Du fait de cette polydispersité , les échantillons ne peuvent être définis que par une dimension moyenne et suivant les méthodes utilisées, ces valeurs moyennes peuvent être différentes.9. Importance et applications des colloïdesUne grande partie de la matière vivante est colloïdale (hyaloplasme des cellules, plasma sanguin) ainsi que certains produits qui proviennent des êtres vivants (lait, œufs).Le lait est un sol (solution de diverses protéines contenant en suspension des particules ultramicroscopiques de phosphate de calcium associé à la caséine et, en outre, des sphérules lipidiques de plus grand diamètre, qu’on extrait aisément pour en faire le beurre). Le blanc d’œuf est constitué principalement par de l’ovalbumine, le jaune d’œuf par des phospholipides et des protéines.Les gelées de fruits naturelles doivent leur caractère de gel à la pectine , produit qui «prend» à la cuisson et qui existe assez abondamment dans les pommes.D’autres substances, comme la gélatine, l’agar-agar ou les carraghénanes (extraits de certaines algues), sont parfois utilisées pour aider la «prise» des gelées de fruits, ou bien pour épaissir certains entremets («crèmes glacées»). On peut employer à des usages analogues l’empois d’amidon.Certains radioéléments artificiels à vie brève (or, cuivre, yttrium, etc.) sont utilisés en médecine sous forme colloïdale. Injectées dans les cavités pleurales et péritonéales ou infiltrées dans un tissu, les particules colloïdales insolubles et de dimensions importantes ne sont pas entraînées dans les processus métaboliques et demeurent en principe au point d’injection. Les radiocolloïdes sont ainsi employés dans le traitement palliatif de certains néoplasmes, car les rayonnements radioactifs qu’ils émettent peuvent détruire certaines tumeurs. Mais c’est surtout pour l’usage diagnostique qu’ils sont utilisés en médecine. Administrés à de très faibles doses, ils permettent alors l’exploration externe de certains organes. Ainsi les colloïdes radioactifs (métaux et sulfures colloïdaux, protéines polymérisées...) sont captés par le système réticulo-endothélial, en particulier par le foie. La mesure de la radioactivité au moyen de détecteurs externes permet de «visualiser» cet organe et d’en tirer des conclusions sur son fonctionnement normal ou pathologique.En parfumerie , outre des laits et des crèmes de beauté dont l’excipient est un gel, les shampooings sont essentiellement des solutions micellaires de détergents.Dans de nombreuses industries, on utilise les agents de surface en solution comme mouillants, émulsionnants, détergents, et très largement, à ce dernier titre, dans la technique ménagère.Dans la polymérisation en émulsion, où l’on développe considérablement, grâce à un émulsionnant, la surface de contact entre un monomère insoluble dans l’eau et un agent de polymérisation hydrosoluble, une partie de la réaction se fait au sein même des micelles dans lesquelles se dissout le monomère.Les surfactants sont également utilisés dans la récupération tertiaire du pétrole.Les méthodes classiques d’exploitation des gisements de pétrole: simple abaissement de la pression, puis injection d’eau et/ou de vapeur, ne permettent pas, en général, de récupérer plus de 30 p. 100 de l’huile initialement en place. Cette faible valeur est due, pour une bonne partie, au mauvais balayage «microscopique» par l’eau que l’on injecte au milieu poreux contenant le pétrole. En raison des faibles dimensions des pores, les forces capillaires sont très élevées et l’huile se trouve piégée sous forme de globules discontinus. Pour améliorer l’efficacité de ce balayage, on a depuis longtemps pensé à abaisser, voire à annuler, la tension interfaciale entre l’huile et l’eau; l’emploi d’alcool miscible, envisagé et étudié dans le passé, n’a pas été retenu pour des raisons économiques.Aujourd’hui (en 1981) la voie la plus prometteuse est l’utilisation des solutions micellaires de tensioactifs, notamment de microémulsions. Ce sont des solutions homogènes fluides et stables composées de quatre constituants: l’eau salée, l’huile, un ou plusieurs tensioactifs, et un quatrième constituant appelé cotensioactif qui est en général un alcool à chaîne courte (de C3 à C7). Les tensioactifs sont des corps chimiques possédant deux groupements; le premier court, polaire ou ionique a une grande affinité pour l’eau, le second qui contient une chaîne aliphatique plus ou moins longue est hydrophobe.Alors que la tension interfaciale entre de l’eau ordinaire et du pétrole est de l’ordre de 30.10-3N/m, l’utilisation de microémulsions permet d’atteindre des tensions interfaciales exceptionnellement basses (de 10-5N/m à 10-7N/m). La technique de la récupération tertiaire consiste à injecter un volume limité (5 à 10 p. 100 du volume des pores) de microémulsions, suivi par de l’eau à laquelle on ajoute des polymères pour en augmenter la viscosité et ainsi en stabiliser la progression. Outre des qualités sur le plan des tensions interfaciales, l’on demande aux microémulsions des propriétés rhéologiques particulières (viscosités convenables, absence de gels...), une grande stabilité en température et en présence de sels et une absorption faible de ses constituants actifs sur la matrice minérale.Les produits utilisés à l’heure actuelle pour fabriquer des microémulsions à usages industriels sont essentiellement de la saumure, du pétrole brut, des tensioactifs, soit anioniques (alkyl-aryl-sulfonates obtenus par sulfonation du pétrole), soit non ioniques (alcools ou phénols polyoxyéthyléniques ou polyoxypropyléniques), ainsi que des alcools légers (C3 à C7).Pour l’instant, le procédé de récupération du pétrole par microémulsion n’est techniquement applicable qu’à des cas privilégiés (température peu élevée, salinité de l’eau faible, réservoir homogène, perméabilité des milieux poreux suffisante...). De même l’aspect économique du problème est complexe: la dépense en tensioactifs, alcools, polymères représente 50 p. 100 du prix de revient de l’huile récupérée. La récupération de 106 tonnes de pétrole demande environ 50 000 tonnes de sulfonates et 16 000 tonnes d’alcools.À titre d’exemple, la figure 6 montre une opération de récupération par procédé chimique (microémulsion + polymère); dans ce cas de figure, de l’eau très peu chargée en pétrole s’évacue par les puits producteurs. La microémulsion, par ses propriétés de miscibilité et de tensions interfaciales très basses, libère une grande quantité d’huile non récupérable par un balayage à l’eau; cette huile est rassemblée à l’avant de la microémulsion sous la forme d’un «banc» qui s’enrichit des nodules d’huile qu’il rencontre. À l’arrière de la microémulsion un volume important d’eau épaissie avec des polymères joue le rôle de piston pour déplacer l’ensemble.Une émulsion photographique est essentiellement constituée par une très fine dispersion de bromure d’argent dans un gel de gélatine, appliqué en couche mince, à chaud, sur un support opaque (papier) ou transparent. Le gel de gélatine est un excipient perméable aux solutions aqueuses. Par ses impuretés sulfurées, il joue un rôle important dans la réaction de réduction de l’argent amorcée par la lumière et renforcée par les «révélateurs»; la gélatine n’a pu être remplacée, jusqu’à présent, pour cet usage, par aucun gel de macromolécules synthétiques.Enfin bien des colles sont de nature colloïdale; d’ailleurs leur nom même a été à l’origine de celui de colloïdes. Ce sont des adhésifs , c’est-à-dire des substances employées de façon à former une pièce unique.De nombreuses colles sont obtenues à partir de produits naturels, qu’il s’agisse de substances d’origine animale (os, cartilage, peau...) ou végétale (amidon, dextrines, caséine, cellulose, gommes...). Mais le développement des adhésifs d’origine synthétique a été considérable depuis quelques années. On les divise généralement en plusieurs catégories. Certains adhésifs sont transformés par polymérisation ou polycondensation sous l’action de la chaleur et en général d’un catalyseur en une substance non fusible et insoluble: résines époxydes (Araldite...). D’autres dits thermoplastiques sont d’une façon permanente fusibles et solubles; ils se ramollissent à la chaleur et durcissent par refroidissement: divers polyvinyls (acétate, alcool), polymères acryliques, polyuréthanes...; ils se présentent souvent en solution dans un solvant organique. Et quelques-uns possèdent une certaine élasticité, comme les silicones, les polychloroprènes (Néoprène).
Encyclopédie Universelle. 2012.